Conçue comme une Face A, prélude conceptuel à la Face B prévue à Bordeaux en 2026, cette exposition offre une immersion dans la surface sensible de son œuvre : peinture, écriture, sculpture, textiles, performances et dispositifs lumineux, autant d’éléments qui témoignent de sa réflexion subversive sur les lettres comme armes plastiques.
Né dans le Queens à New York en 1960, Rammellzee, dont le pseudonyme est inspiré de l’alchimie et du langage codé, est un artiste pluridisciplinaire à la croisée du graffiti, du hip-hop, de la philosophie et de la science-fiction. Autodidacte et théoricien radical, il s’impose dans l’underground new-yorkais des années 1980 avec une vision singulière du langage : selon lui, les lettres doivent être armées afin d’échapper à l’ordre imposé par les institutions et redevenir des entités libres. Graffeur sur les métros, performeur masqué, rappeur (notamment sur le mythique Beat Bop, produit par Jean-Michel Basquiat), créateur de costumes et de sculptures futuristes, il bâtit une mythologie personnelle peuplée de chevaliers intergalactiques, de batailles sémantiques et de gothic futurism. Jusqu’à sa mort en 2010, Rammellzee cultiva l’anonymat et la complexité, laissant derrière lui une œuvre dense, polymorphe et en avance sur son temps.
Rammellzee se distingue par sa méthode : l’armamentation, une métaphore guerrière qui transforme les lettres et les symboles en instruments de lutte contre les formes établies du langage. L’exposition explore en profondeur ce concept et dévoile ses motifs clés : la lettre, la flèche, le masque, autant d’éléments traduits en objets hybrides – sculptures, peintures et costumes UV évoquant des exosquelettes futuristes. Dès l’entrée, les œuvres flirtent avec l’abstraction lumineuse : peintures en résine, sprays multicolores, lumière noire et textiles fluorescents créent un espace visuel dense et vibratoire. À ces fresques s’ajoutent les tag-machines, sculptures animées prenant la forme de Letter Racers, ces voitures-lettre étranges et colorées, suspendues comme autant de totems en mouvement.
Pensée comme un vinyle inachevé, l’exposition évolue au rythme d’un parcours multisensoriel. Peinture et écriture y côtoient performances, musiques et costumes, révélant l’approche transversale de Rammellzee : il ne crée pas uniquement des objets, il conçoit un univers total où chaque pièce dialogue avec l’autre, entre cosmos et bruit urbain. Bien que Face A mette l’accent sur les matières et les surfaces, elle esquisse déjà les pistes de la suite bordelaise, plus théorique et structurelle. Conçue comme un diptyque, Face B, qui ouvrira au CAPC de Bordeaux du 12 mars au 20 septembre 2026, mettra en lumière ses réseaux d’influences, ses collaborations, notamment avec Futura 2000, ainsi que les fondements idéologiques de son œuvre.
ALPHABETA SIGMA (Face A) propose une plongée vertigineuse dans l’univers esthétique et conceptuel de Rammellzee : une expérience visuelle et sensorielle où l’artiste radical arme visuellement le langage, fusionne art urbain, son, textes et costumes. Un voyage initiatique à ne pas rater avant d’en découvrir plus tard, à Bordeaux, la structure cachée.
En bref
Du 12 juin au 7 septembre 2025
Lieu : Palais de Tokyo, 13 avenue du Président Wilson, Paris 16ᵉ
palaisdetokyo.com