C’est un événement hautement symbolique pour la Ruhr : Udo Lindenberg, figure majeure du rock allemand et icône rebelle, investit la Ludwiggalerie du château d’Oberhausen. Intitulée „Kometenhaft panisch“, cette grande rétrospective rassemble plus de 300 œuvres, parmi lesquelles ses célèbres „Udogrammes et Likörellen“. Le lieu est entièrement transformé pour immerger le public dans le fantasque Udoverse, monde fait de sons, de couleurs et de revendications.
Dès l’entrée, l’exposition donne le ton., le message est clair : l’art d’Udo n’est pas que divertissement, c’est une tribune. Avec des œuvres-chocs comme „Gegen rechte Gewalt (Pimmelköppe)“, il fustige l’extrémisme de droite. À ses toiles aux allures de caricatures acides répondent des images de tolérance comme Famille humaine, ode pacifique à la diversité. Pour Christine Vogt, directrice du musée, „Udo Lindenberg est autant artiste que militant. Chaque œuvre est une prise de position.“
Impossible de dissocier Udo Lindenberg de la musique. Quarante albums studio retracent sa carrière, écoutables grâce à soixante lecteurs multimédias présents dans l’aile latérale du musée. De ses débuts comme batteur au succès fulgurant du titre „Komet“, le parcours est présenté dans une ambiance à la fois intime et immersive. Frank Bartsch, co-commissaire et archiviste du projet, souligne : „Udo a toujours refusé les chemins balisés. Il a appris seul, sans formation académique, que ce soit en musique ou en peinture.“ Sa méthode préférée : expérimenter, innover, déranger.
Avant les stades pleins à craquer, Udo Lindenberg connaît les détours improbables. À 16 ans, il quitte le système scolaire avec un certificat modeste. Recalé à l’examen d’entrée du conservatoire de Duisbourg, jugé „globalement satisfaisant“, il choisit l’exil plutôt que l’échec. Direction la Libye, où il décroche un poste de batteur dans les clubs d’une base aérienne américaine près de Tripoli. Pendant plusieurs mois, il y joue pour les soldats, gagne 200 dollars par mois et forge son caractère indépendant. Ce séjour initiatique, loin des projecteurs, l’endurcit et marque le véritable départ de sa carrière de globe-trotter musical.
Côté peinture, ses œuvres flirtent avec le cartoon et l’absurde, mais recèlent toujours une part de critique. Les Likörelle, aquarelles colorées réalisées à base de liqueurs (œuf, cerise, menthe), incarnent cette liberté de ton si caractéristique de l’artiste. Il revisite aussi Goethe, les Dix Commandements et d’autres figures mythiques avec un humour parfois corrosif.
L’exposition à Oberhausen revêt une importance particulière pour l’artiste, installé à Hambourg depuis 1995. „La Ruhr, c’est chez moi. Chaque concert ici a toujours été comme un match à domicile“, écrit-il avec émotion. Ce retour dans la région de ses premiers pas, de Gronau à Duisbourg, est un hommage vivant à ses racines.
Kometenhaft panisch ne se contente pas d’exposer : elle embarque. À travers des œuvres monumentales, des dispositifs sonores et une lumière rock, le public est invité à voyager dans la tête d’un artiste inclassable. L’exposition ouvre ses portes ce dimanche, pour une durée qui promet d’attirer fans de la première heure, curieux, et amoureux du mélange entre art et engagement.
Lors d’un échange téléphonique spontané, Uwe Marcus et Ariane Rykov, conservateurs au Kulturschloss Lausitz et membres du conseil d’administration de l’Institut Romy Schneider Archiv und Museum e.V., ont partagé leurs impressions sur l’ouverture de l’exposition à Oberhausen : „Quelle soirée mémorable ! L’exposition „Udo Lindenberg Kometenhaft panisch“ à Oberhausen fut une expérience profondément émouvante. L’art, la musique et le message se sont harmonieusement unis pour créer un moment inoubliable. Les discours poignants et la performance exceptionnelle des conservateurs ont touché chacun d’entre nous. Nous tenons à exprimer notre gratitude à Udo Lindenberg pour son art, sa musique et son message qui ont su nous émouvoir. Ses œuvres transcendent l’art ; elles reflètent notre époque et nous invitent à la réflexion. Nous sommes honorés d’avoir pu découvrir ses créations et d’écouter son message inspirant.“, Uwe Marcus et Ariane Rykov