Le Rallye d’Estonie a été marqué par les performances exceptionnelles de deux pilotes, le finlandais Kalle Rovanperä et le héros local, champion du monde 2019 Ott Tänak (Hyundai), avec au final un effet antagoniste sur le résultat…
À tout juste 20 ans, Kalle Rovanperä (Toyota), a tenu le rallye sur ses épaules tout du long en prenant d’emblée la tête de l’épreuve le jeudi soir. Dès lors, pas un pilote n’a pu le déloger et son avance n’a jamais cessé de croître de jour en jour. Le jeune pilote Toyota était dans sa bulle, et après la mésaventure du favori de l’épreuve Ott Tanak (Hyundai), il a su repousser les attaques des Hyundai de Craig Breen et de Thierry Neuville pour s’échapper.
Pourtant, Ott Tänak était l’homme pressenti pour la victoire, mais le jeune Kalle en grande forme le suivait de très près dans ces spéciales à grande vitesse.
En effet, lors des deux premières spéciales forestières, le pilote local s’est montré le plus véhément en s’imposant dès le début, ouvrant une mince avance sur son coéquipier Craig Breen et le finlandais Kalle Rovanperä.
Avec le départ d’OttTänak, la bataille est devenue une affaire à double sens entre Craig Breen et Kalle Rovanperä. Après la première étape, seulement 8,5 secondes séparent les deux pilotes avec plus loin Thierry Neuville (Hyundai), à quand même plus de 40 secondes.
Toutefois, le samedi matin , la bataille a cependant été rapidement désamorcée. Le jeune finlandais a dégoupillé pour enchaîner une course tout simplement magistrale, surclassant son adversaire de 15 secondes par spéciale pour prendre le contrôle de la compétition et ne plus le quitter. Sébastien Ogier (Toyota) n’a jamais pu se mêler à la lutte, leader du championnat, il avait le désavantage d’ouvrir la route lors des premières spéciales de vendredi. Sur des chemins en graviers fort poussiéreux, ses performances furent donc altérées, mais le septuple champion du monde n’a toutefois jamais été dans le coup pour répliquer à ses rivaux devant, et frustré, il commet aussi une erreur en début d’épreuve où il s’est enlisé à l’extérieur d’un virage, rebondissant hors des ornières.
Un constat étonnant sur ce rallye d’Estonie, les coéquipiers de Kalle Rovanperä et ses rivaux de Hyundai n’étaient tout simplement pas à la hauteur de lui ici à l’exception de Craig Breen (Hyundai), qui était peut-être impliqué dans son duel le plus proche. Le jeune pilote a mis la barre bien haute remportant 6 des 8 spéciales du vendredi pour devenir le leader du rallye. Le jour suivant est également fructueux pour lui puisqu’il a réussi à convertir son avance de 8,5 secondes à 50,7 secondes sur son dauphin en fin de journée.
Au final, il a réussi à conserver la tête pour franchir la ligne d’arrivée avec un écart respectable de 59,9 secondes sur Craig Breen, qui réitère son meilleur résultat en WRC. Ses 4 podiums en WRC à ce jour sont dus à la rapidité. Cette 2e place reflète le résultat qu’il avait obtenu un plus tôt, mais ce succès n’était pas moins impressionnant que le premier. Même s’il fut favorisé par sa position de départ, l’irlandais n’avait jamais conduit de Hyundai WRC sur terre jusqu’à présent, seulement un R5, et il est sûr que sa lutte pour la victoire ici aurait duré beaucoup plus longtemps s’il avait été plus familiarisé avec la i20 WRC de Hyundai par opposition à la i20 R5.
Il serait intéressant de voir ce que Craig Breen peut vraiment faire avec tous les outils à sa disposition. Chaque événement qu’il commence, il le fait avec un bras attaché derrière son dos. Vu la situation du constructeur coréen, les portes devraient lui être ouvertes en grand.
Derrière, à 12,5 secondes, Thierry Neuville, a assuré la dernière marche du podium. Les chances du pilote belge de passer son coéquipier irlandais ont été gâchées par une pénalité de 10 secondes pour avoir déclenché l’avant-dernière étape une minute trop tard. L’épreuve du pilote belge a toutefois connu quelques ratés : une crevaison vendredi matin puis une pénalité, mais dans l’ensemble, l’Estonie a été une bonne épreuve pour lui puisqu’il a décroché son 5e podium de la saison.
Quant au leader du championnat Sébastien Ogier (Toyota), le Rallye d’Estonie avait pour objectif la défense de sa première place au classement, ce qu’il a réussi à faire avec succès. Malgré une 4e place, le français reste en tête, et même augmente son avance.
Pour sa part, Elfyn Evans (Toyota) a semblé un peu distant. Sans confiance au volant de sa Yaris, il resta bien loin des batailles au sommet. Il ne pouvait tout simplement même pas suivre le rythme de son coéquipier et rival pour le titre Sébastien Ogier, et cela coûte cher étant donné que ce dernier n’était pas plus à son meilleur niveau.
Depuis sa dernière victoire au Portugal, le gallois est incapable d’enchaîner des résultats solides. Mais malgré une forme en déclin, il est toujours dans la course pour le titre suprême.
Pour Ford, la frustration est grande et après le succès du lancement public de son nouveau challenger Puma Rally1, l’équipe M-Sport a été ramenée à la réalité avec une sortie frustrante et déroutante ici en Estonie.
Pourtant, la Fiesta WRC de l’équipe bénéficiait d’un package plus rapide qu’il n’avait été qu’il y a 10 mois. Sa récente mise à niveau du moteur et ses travaux sur la suspension lors des tests pré-estoniens ont été les remèdes.
Cependant, elle n’a jamais vraiment eu de chance de se manifester face à ses rivales sur la terre rapide d’Estonie. Gus Greensmith (Ford) affichait une solide 5e place après la seconde spéciale le vendredi, mais un bug moteur a ensuite plombé sa monture et ensuite ruiné ses espérances. Même constat pour son coéquipier Teemu Suninen (Ford) mais dans une moindre mesure. Pourtant le pilote finlandais a eu une bonne occasion de rappeler à chacun ce qu’il pouvait faire mais quelques erreurs évitables ne l’ont pas aidé outre mesure.
Le français Pierre-Louis Loubet (Hyundai) est arrivé à la fin d’une épreuve pour la première fois cette saison et enregistré ainsi ses premiers points au championnat de 2021 alors qu’il égalait son meilleur résultat en carrière en WRC avec une 7e place.
Excellent 3e en tout début d’épreuve, Takamoto Katsuta (Toyota) n’a pas pu poursuivre sa progression. Le japonais a en effet renoncé sur une liaison, car son copilote Dan Baritt, souffre du dos suite à la réception d’une bosse. C’est le premier abandon du 4e équipage Toyota cette saison.
Durant cette épreuve, le meilleur performer ne s’appelle toutefois pas Kalle Rovanperä (Toyota) mais bien Ott Tänak (Hyundai). Favori incontesté du public disséminé le long des pistes, le pilote estonien a remporté 11 des 24 spéciales, mais sans illusion après ses mésaventures du vendredi.
Reparti en fond de classement, le samedi matin, il est tout de même offert la Power Stage du dimanche pour prendre les 5 points de bonus comme lot de consolation.
Mais le mal avait déjà été fait dans une saison à oublier pour l’ancien champion du monde estonien, qui a admis que sa candidature au titre était désormais plus que compromise.
WRC-2 : Querelle de norvégiens
Nettement plus rapide en début d’épreuve, Mads Ostberg (Citroën), perd rapidement son avantage avec une crevaison. Andreas Mikkelsen (Skoda) qui pointait derrière le champion sortant, pris la suite, mais n’arrivait pas à creuser un écart substantiel sur son compatriote. Ce dernier revenait rapidement sur lui avant qu’une autre crevaison ne vienne encore le bloquer. Avec un bel avantage de 26 secondes à l’entame de la dernière journée, Andreas Mikkelsen a quand même du serrer les dents pour s’imposer en voyant son adversaire survoler les spéciales.
Mads Ostberg termine toutefois second malgré plusieurs soucis ce week-end.
Le bolivien Marco Bulacia (Skoda) complétait le podium après une belle bataille avec le français Adrien Fourmaux (Ford).
Que dire de la performance détonante du champion d’Europe en titre qui n’a laissé que des miettes à ses adversaires WRC-2 i compris. D’emblée, le pilote russe de 40 ans donnait le ton claquant les meilleurs temps des premières spéciales et la suite est de la même veine l’après-midi et le samedi pour entamer le dimanche avec plus de 3 minutes d’avance dimanche matin. Un épilogue fou pour Alexey Lukyanuk (Skoda) qui resta dans la même dynamique de grand chelem malgré son avance. Un choix qui lui valut un spectaculaire tonneau dans l’ultime spéciale, mais par chance sa voiture détruite retombait sur ses roues, ce qui a permis de rallier l’arrivée avec toujours un avantage supérieur à 3 minutes sur son dauphin polonais Kajetan Kajetanowicz (Škoda). De plus, il se classe 8e du classement général final.
Mikko Heikkilä (Škoda) en assure le triplé du constructeur tchèque en terminant 3e.