Un Grand-Prix MotoGP dantesque conditionné par l’arrivée de la pluie après 5 tours, ce qui a obligé les pilotes à changer de moto durant l’épreuve. Beaucoup d’erreurs et de chutes ont été le lot de cette course à suspense, ou la météo a quasiment brouillé les cartes.
Sur la grille de départ, 5 minutes avant l’extinction des feux, la course fut déclarée sèche. Aucune pluie tombée depuis le warm-up, ainsi qu’un soleil bien présent semblaient aller dans ce sens. Mais des nuages sombres se profilaient dans les environs, et les tensions étaient naturellement palpables sur la grille. L’ensemble du plateau avait choisi une monte pneumatique soft avant et arrière pour commencer la course, alors que certaines prévisions laissaient présager peut-être de la pluie en fin de course…
Pour le départ, la piste est belle et bien sèche et comme prévu, c’est Jack Miller qui propulse sa Ducati depuis la 3e place sur la grille pour prendre la tête de la course, devant les deux Yamaha officielles de Maverick Viñales et Fabio Quartararo. Marc Marquez (Honda) revient tout juste derrière après une belle passe d’armes avec le japonais Takaaki Nakagami (Honda LCR). Son compatriote et coéquipier Pol Espargaro (Honda) se rate, mais en rattrapant in extremis sa machine, il garde non sans mal sa position, mais oblige Valentino Rossi (Yamaha Petronas) ainsi que son coéquipier Franco Morbidelli (Yamaha Petronas) à passer par l’intérieur, mais à trois de front, ça ne passe pas et la porte s’est refermée sur ce dernier, le poussant dans les graviers. Un incident qui a leur a fait perdre des places surtout à Franco Morbidelli qui a pu repartir après une petite chute, bon dernier.
Pendant ce temps à l’avant, le trio de tête reste inchangé mais il voit dans les rétros Alex Rins (Suzuki), pourtant parti en fond de grille, fondre sur eux, avec Marc Marquez dans son sillage. Dès lors, Fabio Quartararo prend les choses en mains et au terme d’une manœuvre osée dans la chicane Dunlop passe les deux pilotes et s’empare du leadership juste quand la pluie commence à tomber. C’était léger au début, mais ensuite, ça a empiré et au 5e tour, c’était le déluge, les drapeaux blancs sont mis, synonyme pour le peloton de rentrer dans la pitlane pour un échange de moto, une première procédure « Flag to Flag » depuis 4 ans.
Jack Miller tire large avant de rentrer aux stands et de nombreux pilotes ont vraiment du mal à finir le tour sur leurs pneus slicks, dont le champion du monde sortant Joan Mir (Suzuki) qui en fait même la triste expérience. Le n°36 chute et abandonne. Dans la voie des stands c’est la cohue et la bousculade, les deux pilotes officiels Ducati sont pénalisées pour excès de vitesse et ont toutes deux écopé de deux longs tours de pénalité et Fabio Quartararo, entré par inadvertance dans le box de son coéquipier Maverick Viñales, est aussi amendé par un long tour. Dès le changement de machine, les cartes sont redistribuées et dans l’exercice, c’est Marc Marquez (Honda) qui est souvent le plus prompt, il sort en tête et attaque d’emblée. Alex Rins (Suzuki) second essaie également de prendre le large, mais se loupe et chute immédiatement, laissant le champ libre à Fabio Quartararo (Yamaha) et à Jack Miller (Ducati) pour chasser la Honda n°93.
Une chasse de courte durée puisque que le sextuple champion du monde part à terre dans le dernier virage. Il réussit toutefois à se remettre en piste, mais en dernière position. Le français prend alors la tête de course, mais l’australien qui surnage dans ces conditions se rapproche rapidement. Le pilote Ducati a deux longs tours à effectuer, il s’exécute rapidement dans les deux tours suivants et fond irrémédiablement sur Fabio Quartararo, pourtant sur un bon rythme. Après la passation de pouvoir, le pilote français plonge dans la zone de pénalité pour son long tour et en ressort dans la même position avec encore une belle avance sur le 3e, Takaaki Nakagami (Honda LCR). Devant Jack Miller caracole et augmente son avance pour prendre quatre secondes pleine sur le poleman français. Derrière, Johann Zarco (Ducati Pramac) est le plus rapide en piste, et double sans coup férir le pilote japonais et commence à se rapprocher de son compatriote à un rythme élevé, avec près de deux secondes par tour, alors que des lignes sèches commencent à apparaître sur la piste. Auteur d’une incroyable « remontada » Marc Marquez (Honda) enchaîne des tours ultra rapides, mais se fait encore piéger violemment au 18e tour. Le vent et le soleil sèchent rapidement la piste et les pneus pluies commencent à accuser le coup. Les pilotes encore en piste n’ont pas encore décidé de rechanger de machine pour la fin de course. Johann Zarco continue son pressing et revient à 2.5 s de son compatriote à sept tours de la fin…et le dépasse dans la dernière ligne droite pour prendre la 2e place, 7 secondes derrière Jack Miller. Fabio Quartararo possède douze confortables secondes d’avance sur Alex Marquez (Honda LCR), lequel en compagnie de Danilo Petrucci (KTM) ont pris le dessus sur Takaaki Nakagami pour prendre respectivement les 4e et 5e places reléguant le pilote japonais au 6e rang. Pecco Bagnaia est quant à lui aussi sur sa lancée après un départ catastrophique et deux pénalités au long tour, il dépasse le pilote nippon à 6 tours de l’arrivée et son rythme est à l’avenant.
Pour les leaders, le choix est fait : plus de temps pour rentrer dans la pitlane, repartir et utiliser des pneus slicks avantageux. Johann Zarco ne lâche rien et poursuit Jack Miller en lui prenant plus d’1.5 s au tour, mais le pilote australien s’accroche avec un bel effort et son avance reste juste au-dessus de 5 secondes, mais pas moins alors que son coéquipier italien Pecco Bagnaia (Ducati) est déjà remonté 4e.
Johann Zarco tient Fabio Quartararo à distance avec près de 7 s, mais Pecco Bagnaia se rapproche. À la pénultième boucle, l’écart n’est que de 4.3 s entre le duo de tête et derrière Pecco Bagnaia réduit l’écart avec Fabio Quartararo de près de deux secondes par tour. Au dernier tour, Jack Miller remet un coup de collier et se met à l’abri tout comme Fabio Quartararo qui gère parfaitement son avance sur le pilote italien.
Victoire de Jack Miller devant les deux français Johann Zarco et Fabio Quartararo au terme des 27 tours d’une course ô combien passionnante qui annonce une suite tout aussi passionnante.
Après avoir chassé les démons du début de saison à Jerez, Jack Miller se place et n’est plus qu’à 16 points de la tête du championnat, tandis que Johann Zarco remonte sur le podium après deux courses plus délicates au Portugal et en Espagne et de surcroit, avec Fabio Quartararo, ce sont deux pilotes locaux qui montent sur le podium du Grand-Prix de France. Une victoire pour le pilote Yamaha tout juste sorti d’une opération au bras après le Grand-Prix d’Espagne et souvent peu à son aise dans des conditions humides. Au pied du podium l’italien Pecco Bagnaia (Ducati) savoure son résultat d’une course plus que compliquée après des qualifications ratées et deux pénalités de long tour. Il limite bien la casse et perd la tête au championnat du monde, mais seulement d’un point…
Danilo Petrucci qui cette saison a connu des débuts difficiles en tant que pilote KTM, mais le vainqueur sortant du Grand-Prix de France a livré de loin sa meilleure course de la saison pour terminer à une impressionnante 5e place, devant les deux sociétaires du team Honda LCR, Alex Marquez et Takaaki Nakagami. Le premier nommé égale son meilleur résultat de la saison sur un circuit où il était monté sur le podium l’an dernier. Pol Espargaro, 8e, signe également son meilleur résultat de la saison, tandis qu’Iker Lecuona (KTM) arrache la 9e place à Maverick Viñales dans le dernier tour. Le catalan, portant en verve en début de course et lors des qualifications a dû se contenter de la 10e place au drapeau à damier, un résultat discret qui met encore son inconstance en valeur.
Valentino Rossi, 11e, dans le coup pourtant ce week-end a perdu un temps précieux dans les premiers tours suite au cafouillage de Pol Espargaro et n’a pas pu rattraper son retard lorsque la pluie est tombée, et son demi-frère Luca Marini (Ducati VR46), 12e, suit à 10 secondes devant Brad Binder (KTM), 13e. Le Champion du Monde Moto2 Enea Bastianini (Ducati Avintia), 14e, et Tito Rabat (Ducati Pramac), 15e, ferment la marche devant le malheureux Franco Morbidelli (Yamaha Petronas).
Jack Miller
„Juste avant la course, le vent était presque parfaitement stable, mais en début de course, les conditions météo ont changé de façon étonnante ! Beaucoup de pilotes ont failli tomber à cause de la pluie. De plus, j’ai été pénalisé par deux longs laps et j’ai décidé de les faire rapidement. Malgré cela, j’ai réussi à rattraper Fabio et à le passer. Finalement, lorsque le soleil est apparu et que la piste a séché, j’ai hésité à rentrer à nouveau aux stands… La course a été très longue, mais je n’ai pas de mot pour dire à quel point je suis content.“
Johann Zarco
„Je suis vraiment heureux, je me sens bien. C’est un bon résultat. Quand j’ai vu la pluie, j’ai fait un tour de plus, je pense que j’aurais pu gagner la course si j’avais changé un tour plus tôt. Jack avait le pneu tendre à l’arrière, ça l’a aidé au début. Les conditions étaient parfaites pour moi quand ça a séché.“
Fabio Quartararo
„Mon pneu avant est détruit. Franchement, j’étais 19e en troisième séance d’essais sous la pluie. Je suis tellement heureux, vous ne pouvez pas imaginer à quel point.“